Histoire

Published on avril 20th, 2021 | by L'OR Artiste

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Le “Petit Québec” du XIXe siècle de Chicago

Photo d’en-tête : [Edward F. Dunne et un homme non identifié (assis) et Z. P. Brosseau (debout) portant chacun des costumes habillés avec des rubans sur le revers de leur veste].
Crédit photo : Explore.chicagocollections.org

Chicago a des liens historiques avec le Québec depuis l’exploration de Joliet et Marquette en 1673. Les premiers commerçants de fourrures comme Jean-Baptiste du Sable et Antoine Ouilmette ont établi des postes de traite sur les rives du lac Michigan. La région qui deviendra Chicago fait officiellement partie du Québec de 1774 à 1783 (1). À aucun moment la présence canadienne-française n’a été plus perceptible que dans la seconde moitié du XIXe siècle. On estime à 25 000 le nombre de Québécois qui y vivent, desservis par quatre paroisses francophones et plusieurs journaux de langue française. (2)

L’Alliance Française à Chicago de L’OR Artiste.
Crédit Photo : L’Or Artiste.

En 2022, l’Alliance française de Chicago fêtera son 125e anniversaire. L’un des membres fondateurs et second président de l’Alliance française en 1897 était le Zénophile Pierre Brosseau. Z. P. Brosseau est né à La Praire, au Québec, en 1840 et a émigré à Chicago en 1860. Il allait faire fortune en tant qu’investisseur en céréales au Chicago Board of Trade, s’engager dans la politique de Chicago et être un mécène de la communauté francophone de Chicago. Sa nécrologie suggère que pour son travail avec les Français de Chicago, il a été fait Chevalier de la Légion d’honneur par le président de la France. ( 3) Il n’existe aucune trace que Z. P. Brosseau ait eu une quelconque interaction avec un compatriote e expatrié, Louis Honoré Fréchette, mais il est raisonnable de supposer qu’ils se sont connus pendant une partie des cinq années ou Fréchette a résidé à Chicago. Brosseau et Fréchette étaient tous deux des bienfaiteurs de la communauté canadienne-française de Chicago.

Le poète québécois Louis Honoré Fréchette a parlé de son exil volontaire dans La voix d’un exil. (4) Il quitte Lévis, au Québec, désillusionné par la politique locale, et se réfugie à Chicago de 1866 à 1871. On sait qu’il s’installe dans la paroisse Saint-Joseph, dans le quartier de Brighton Park à Chicago. Il sera rapatrié à Lévis après l’incendie de Chicago et connaîtra le succès tant comme poète que comme politicien. Son bref exil à Chicago lui apporte également le succès. Il jouera un rôle déterminant dans la formation du chapitre local de la bienveillante Société Saint-Jean-Baptiste. (5) Il a contribué en tant qu’écrivain aux journaux français de Chicago L’Observateur et L’Amérique. Il a fondé ce dernier et en a été le rédacteur en chef. Le chemin de fer qui l’a amené à Chicago lui a donné un emploi de secrétaire d’administration au département des terres de l’Illinois Central Railroad. Fréchette a écrit plusieurs pièces de théâtre à Chicago qui ont été perdues dans l’incendie. Le Dr Elzéar Paquin nous dit qu’une pièce écrite par Fréchette en 1862, Félix Poutre, était populaire à Chicago. Cette pièce, à caractère historique, était favorable au soulèvement de Québec de 1838 contre les Britanniques. (6) Fréchette, lors d’un bref retour dans la région de Québec, au sud du Saint-Laurent, en 1870, est un partisan de l’annexion aux États-Unis. Il sera rapatrié à Lévis peu après et sera député au Parlement canadien (1874-1878).

Le programme d’archives suivant concerne Louis Fréchette. C’est d’une diffusion du 18 décembre 2019 à Québec. Les 7 premières minutes sont des nouvelles de ce jour.

https://ici.radio-canada.ca/ohdio/premiere/emissions/aujourd-hui-l-histoire/segments/entrevue/146156/louis-frechette-premier-poete-national-quebecois-conteur-claude-lacharite

Elzéar Paquin nous a laissé une trace de la communauté catholique française de Chicago pendant la seconde moitié du XIXe siècle. (7) L’objectif de ce pamphlet était de dissiper l’idée fausse selon laquelle les immigrants canadiens français étaient socialement isolés . Selon les mots de Paquin :

En Canada, on n’était sous l’impression que les canadiens-français émigrés dans le Michigan, le Wisconsin, l’illinois, et les autres états de l’Ouest, ne formaient pas de groupes importants, se trouvant trop diséminés partout.

Certains ont prospéré, la plupart ont simplement été assimilés dans une société du grand Chicago. La plupart des gens avaient comme port d’entrée d’origine une paroisse Canadienne française. Paquin lui- même émigre de Québec en 1883. Il est né à Saint-Raphaël en 1850, a fréquenté le séminaire de Montréal, puis la faculté de médecine du Victoria College of Medicine à Montréal (1878). En 1889, il fonde un journal français ( Le Combat ) à Chicago. Avant de s’installer à Chicago, il a organisé les chapitres locaux de la Société Saint-Jean-Baptiste aux États-Unis. Il a été actif défenseur des canadien-français aux États-Unis. Fréchette et Paquin n’étaient pas à Chicago à la même époque et la seule conclusion qu’on peut tirer des pièces de Fréchette est la mention de sa pièce, Félix Poutre. La pièce a été mentionnée pour illustrer comment un contemporain de Paquin, Antoine Grignon, a soutenu la paroisse Notre-Dame avec les recettes de sa troupe de théâtre français.

Notre-Dame. Crédit Photo :
https://portal-ccc.s3.amazonaws.com/media/images/newberry/115/zs2mj9h.jpg

La première des paroisses canadiennes-françaises était Notre Dame, établie en 1866, détruite en 1871 et reconstruite dans les années 1880. Trois membres du comité d’organisation de Notre-Dame deviendront les dirigeants fondateurs du chapitre de Chicago de la société Saint- Jean-Baptiste. Il s’agit du président, Olivier Decelles, du vice-président, Cyrille Lebeau, et du trésorier, Éphrem Watier. Paquin consacre un chapitre à la discussion de Notre -Dame, mais une étude plus complète peut être trouvée dans un document de thèse de maîtrise de 1936 par Catherine Dempsey; une étudiante française diplômée à l’Université Loyola de Chicago . Sa thèse, La Paroisse Notre-Dame de Chicago, a été présentée pour sa maîtrise en français, mais démontre la discipline d’un historien de formation. (8)

Un autre membre de l’effort d’organisation de Notre-Dame est Toussaint Ménard, un entrepreneur né à Saint-Luc, Québec, en 1818. Il arrivera à Chicago vers 1851, peu de temps après l’achèvement du chemin de fer en provenance de l’est. (Pour en savoir plus sur Ménard, voir la discussion sur le Collège Saint-Ignace, sujet d’un futur article). Avec l’achèvement du chemin de fer, Chicago connaît une hyper- croissance. En 1850, la population était de 29 963 habitants et elle est passée à 1,5 million en 1900. Un autre architecte québécois, Louis-Jean-Baptiste Bourgeois, était actif à Chicago dans les années 1880 et 1890 : Magazine français Quater article du 21 septembre 2020. (9) Paquin ne fait aucune référence à Bourgeois et au fait que Bourgeois ne s’est peut-être pas impliqué dans la communauté québécoise de Chicago.

Deux peintres québécois, Siméon Alary et sa fille, Honora Alary, sont arrivés à Chicago en 1902. Tous deux sont originaires de la région de Québec et se sont d’abord établis à la paroisse Notre-Dame. Ils étaient portraitistes et on suppose qu’ils auraient été au service de leurs confrères paroissiens. Vers 1920, la famille Alary s’est installée dans la communauté exclusive d’Oak Park, juste à l’ouest de Chicago. C’est là que Frank Lloyd Wright a conçu sa maison ainsi que celle de beaucoup de ses voisins. Cela aurait été une base d’opération idéale pour les portraitistes. (10) Le Musée national des Beaux-Arts du Québec cherche à élargir sa collection des deux artistes, mais les portraits deviennent des héritages familiaux et n’entrent pas sur le marché de l’art.

1. Les termes Canadien français et Québécois sont interchangeables dans cet article. En 1764, l’Acte de Québec a établi les frontières du Québec comme étant la plupart des provinces actuelles de l’Ontario et du Québec, et toutes les terres à l’est du Mississippi et au nord de l’Ohio. En 1791, l’est du Canada a été divisé en Haut et Bas Canada. Le Bas-Canada étant la plus grande partie du Québec actuel et le Haut- Canada la plus grande partie de l’Ontario actuel. Le nom de Québec a été réattribué à la région actuelle lors de la formation du Dominion du Canada en 1867. Canadien français est un terme qui désigne tous les Canadiens de langue française, bien que la plupart d’entre eux n’aient jamais abandonné l’identité québécoise. Dans la première moitié du XIXe siècle; siècle ou il y a eu un mouvement dans le Bas- Canada pour l’annexion aux États-Unis. C’était pour des raisons économiques, mais deux obstacles majeurs ont empêché le mouvement de gagner beaucoup de soutien. D’une part, la crainte d’être entraîné dans l’imminence de la guerre civile américaine. L’autre était la crainte de l’anti-catholicisme américain.

2. La Presse Française De Chicago par Louis-Philippe Cormier (1957) page 366 Gratuit en ligne
https://www.erudit.org/en/journals/haf/1957-v11-n3-haf2020/301847ar.pdf

3. https://www.newspapers.com/clip/43098874/obituary-for-z-p-brosseau-aged-79/

4. Voir le livre en ligne gratuit
https://beq.ebooksgratuits.com/pdf/Frechette-Poutre.pdf

5. J’ai découvert une référence à une réunion de la Société Française de Bienfaisance dans le Chicago Tribune ( 26 mai 1863 ). Il s’agissait d’une section locale de la Société Française de Bienfaisance de Philadelphie. Voir http://www2.hsp.org/collections/Balch%20manuscript_guide/html/french_benevolent_society.html

La Société Saint-Jean-Baptiste a été fondée à Montréal en 1843 pour promouvoir les intérêts des francophones du Bas-Canada. La mission de Fréchette à Chicago suggère que la French Benevolent Society ne répondait pas aux besoins de la population canadienne-française croissante. On peut se demander si la Société Saint-Jean-Baptiste a aidé les Québécois à s’installer aux États-Unis ou si son but était de recueillir des fonds auprès de ces mêmes expatriés pour soutenir les Québécois restés au pays.

6. http://www.biographi.ca/en/bio/frechette_louis_13F.html

7. Voir l’échantillon en ligne gratuit https://fr.wikisource.org/wiki/La_colonie_Canadienne-Fran %C3%A7aise_de_Chicago

8. Voir la thèse gratuite en ligne
https://ecommons.luc.edu/luc_theses/135/

9. https://frenchquartermag.com/index.php/2020/09/21/art-exhibit-tributes-quebec-architect-louis-jean- baptiste-bourgeois/?lang=fr

10. Le Musée national des Beaux-Arts du Québec veut élargir sa collection de Siméon et d’Honora Alary.
https://collections.mnbaq.org/fr/artiste/600002546
https://collections.mnbaq.org/fr/artiste/600017280

Si quelqu’un croit avoir un portrait, fait par l’un ou l’autre des artistes, d’un ancêtre qui résidait dans la paroisse Notre Dame au début du 20ème siècle. Siècle, il doit contacter M. Daniel Drouin, Conservateur de l’art ancien, Daniel.Drouin@mnbaq.org

Remerciements particuliers à Ellen Skerrett, éminente autorité en matière d’histoire de l’église catholique de Chicago. https://www.chicagotribune.com/news/ct-xpm-1997-09-14-9709140174- story.html

Alex Severino, qui a fait des recherches approfondies sur l’histoire du lycée St. Ignatius, a également contribué à cet article. Tous deux ont également contribué à un futur article sur la paroisse Holy Family à Chicago et sur le travail de trois Québécois dans sa construction.

Peinture de L’OR Artiste intitulée “Courtyard of Alliance Française.”
Cette peinture fait maintenant partie de la collection du département français du Saint Michael’s College, Vermont.
Crédit Photo : L’OR Artiste.

Images :
1. 1. Peinture de la cour de l’Alliance française de Chicago par L’OR Artiste. Le tableau est exposé en permanence avec le département français du Saint Michael’s College à Colchester, Vermont.
2. Photo de Z.P. Brosseau, président de l’Alliance française de Chicago ( 1901-1908 )
3. Photo de la paroisse Notre Dame, Chicago


About the Author

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est née à Montréal en 1960. C'est une artiste internationale principalement connue pour ses figures nues. Son modèle préféré est son mari qui sert également d'agent et de publiciste. Depuis leur mariage en 2013, ils travaillent en équipe pour réaliser des expositions d'art aux États-Unis qui relatent les contributions françaises et québécoises à l'histoire et à la culture américaine. Ces expositions sont des scènes urbaines qui ont un sens du mouvement et de la spontanéité des peintures de portraits. L'artiste a adopté ses initiales pour son nom professionnel. Elle vit avec son mari, un anglophone de Chicago à Longueuil au Québec.



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