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Published on juillet 9th, 2022 | by Isabelle Vaurie

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Notre Interviewé du Jour : Le Journaliste français Olivier O’Mahony qui est Correspondant aux Etats-Unis de Paris-Match

Depuis 2009, le journaliste français Olivier O’Mahony est le correspondant aux Etats-Unis de Paris-Match (PM), le premier magazine français d’actualité. De New York, il observe, analyse, décrypte et interviewe l’Amérique, pour la rendre plus compréhensible outre-Atlantique. Il rencontre ainsi les personnalités qui font l’Amérique dont Bill et Melinda Gates, Matthew McConaughey ou encore les Clinton sur qui il a écrit un livre (Les Billary, 2016). Cette fois, le journaliste est dans le siège de l’interviewé. 

Le journaliste français Olivier O’Mahony, envoyé Spécial aux Etats-Unis de Paris-Match.
Crédit Photo : Olivier O’Mahony

En quoi travailler aux Etats-unis est-il différent pour un journaliste français ?

« L’accès aux sources est beaucoup plus difficile qu’en France. Les Américains sont pragmatiques, quand ils ont quelque chose à dire, c’est pour que ce soit utile, et ils veulent de l’audience, donc parler à un journaliste pour un lectorat français n’a pas réellement d’intérêt pour eux, c’est ce qui rend le travail nettement plus compliqué : pour avoir une interview il faut un énorme travail de fond, parfois de longue haleine. Bien sûr, quand il s’agit de personnes ayant publié un livre qui sera traduit en français, les éditeurs interviennent et nous facilitent la tâche, espérant faire la couverture de PM mais même comme ça, cela reste difficile. En France, Paris Match a un statut privilégié, c’est tout autre chose. »

Vous avez eu l’exclusivité de l’interview de Mary Trump, la nièce qui a écrit un livre sur son oncle et révélé des secrets de famille, comment cela s’est-il passé ?

« Très bon exemple justement : au départ elle ne voulait pas me recevoir en personne, nous avons eu un entretien en visioconférence, mais après plus d’une heure où elle répondait de façon très franche, je lui ai expliqué que nous avions besoin de photos. Comme elle se sentait en confiance, elle a accepté, nous avons pu aller la voir à Cape Cod pour des photos reflétant bien de ce moment-là. Elle est directe, intelligente, on a eu des échanges instructifs sur la famille Trump et sur son oncle. Mais si cela avait été pour un grand magazine américain, elle aurait tout de suite dit oui pour l’interview sur place et les photos. »

Et vous avez aussi réussi à avoir l’interview exclusive de Nafissatou Diallo, l’accusatrice de Dominique Strauss Kahn dans ce qui a été appelé ‘l’affaire du Sofitel”. Comment cela a-t- il été possible ?!

« En janvier 2020, au premier jour du procès de Harvey Weinstein à New York, je tombe au tribunal sur Douglas Wigdor, l’un des deux avocats qui la défendaient en 2011 pendant « l’affaire du Sofitel ». Il m’apprend qu’elle a écrit un livre, qui est passé totalement inaperçu, ce qui semble beaucoup le chagriner. Je suis sidéré : comment ai-je pu passer à côté ? Nafissatou Diallo n’a pas parlé à la presse depuis 9 ans. Ce livre prouve qu’elle a envie de le faire, alors que nous pensions tous que l’accord qu’elle avait passé avec DSK était assorti d’une clause de confidentialité. J’ai donc contacté son avocat qui m’a mis en relation avec son pasteur que j’avais déjà rencontré. Il m’a promis d’organiser la rencontre et l’interview en août 2020, et cela s’est passé comme ça.»

Qu’avez-vous pensé de son témoignage ? 

« Je fais partie de ceux qui la croient. Cette femme s’est retrouvée en première ligne alors qu’elle ne s’y attendait pas, et d’une façon pour le moins violente. Sa vie a été bouleversée, elle est aujourd’hui très discrète pour se préserver.» 

Quel est votre meilleur souvenir en tant qu’envoyé spécial aux USA ? 

« Sans hésiter la campagne des présidentielles de 2016. J’ai eu le rare privilège d’être accrédité et d’être LE journaliste étranger qui pouvait être dans le petit cercle des journalistes autorisés à suivre la campagne partout avec Hillary Clinton. C’était incroyablement riche et palpitant, j’ai pu aller dans des endroits dans lesquels les journalistes étrangers ne peuvent pas aller habituellement. Je vous parlais de l’accès difficile aux sources en tant que correspondant étranger, mais là, j’étais à égalité avec un confrère américain. » 

Vous aviez publié un livre sur le couple Clinton justement ?

Oui, il est intitulé « Les Billary » (éditions Flammarion). Je voulais mettre en lumière les années que ce couple avait traversées, et qui sont un gros morceau de l’histoire américaine contemporaine. Un parcours incroyable pour deux jeunes Américains qui se sont rencontrés à Yale en 1971, et vont devenir le couple politique qu’on connaît. C’est une histoire passionnante que j’ai voulu écrire parce que je me sentais légitime, ayant interviewé l’un et l’autre pour Paris Match. Le livre s’arrête en 2016, donc cela permettait de parler d’une Amérique qui est aujourd’hui reléguée à la préhistoire ! » 

Préhistoire ? …

« Quand je suis arrivé en 2009, B.Obama était à la Maison Blanche depuis janvier et j’ai eu l’impression de vivre l’Amérique de JF Kennedy, où tout était possible, le mythe d’une Amérique heureuse, où le président garantissait « yes we can » et « this is not who we are », une Amérique plus ouverte et plus juste, et résolument tournée vers les droits de l’Homme. C’était aussi l’Amérique qui avait Mitt Romney comme représentant des Républicains face à Obama, Romney s’est opposé à Trump ensuite au sein de son parti, c’était courageux. Et puis le choc de l’élection de D. Trump, et une impression de retour en arrière sur tellement de sujets. La preuve en est :  cette remise en cause de l’avortement aujourd’hui -dans au moins 26 états, 13 l’interdiront et 13 vont le rendre très difficilement praticable – n’était pas imaginable à l’époque. Souvenez-vous, en 2015 le mariage gay a été autorisé au niveau fédéral, ce ne serait pas possible aujourd’hui. C’était un message fort. Il suffit de regarder le conservatisme ambiant pour comprendre que les clivages se sont accentués. L’Amérique s’est divisée et c’est perceptible à bien des niveaux. Si en 2024 Trump se représente, cela sera de nouveau un tournant…

Et votre pire souvenir ? 

« Justement le soir des élections 2016 quand la victoire de Trump a été annoncée et que je n’avais rien vu venir : quand on se trompe, c’est toujours difficile à admettre, même si l’erreur était partagée par tout le monde ou presque !»

Quels sont les clichés qui vous énervent sur les Français ici ou sur les Américains vus par les Français ?

« Sans aucune hésitation un show qui s’appelle « Emily in Paris » qui passe sur Netflix et qui prend les Français pour des « j’m’en-foutistes, » c’est insupportable, ça fait rire beaucoup de gens visiblement, tous les clichés y sont, et l’image de la France y est si mauvaise… c’est exaspérant. Et en France, les Français ont tendance à dire que les Américains sont puritains ! Mais j’ai vu ici des choses que je n’aurais pas vues en France, on ne peut pas résumer à un seul mot plus de 330 millions d’Américains, avec des origines si diverses en plus. Les Français pensent pouvoir définir l’Amérique en quelques stéréotypes, dont le puritanisme, mais les 50 états ont tellement de particularités que c’est impossible. C’est ce qui fait toute la richesse de l’Amérique. »

Richesse que justement les articles d’Olivier O’Mahony montrent bien, pour que les lecteurs français puissent comprendre les USA au-delà des clichés.  

« Les Billary » d’Olivier O’Mahony publié chez Flammarion en 2016

Crédit Photo d’en-tête : Olivier Douliery


About the Author

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est agrégée d'anglais et diplômée en sociologie. Elle enseigne dans le supérieur et elle vit depuis 2021 sur L'Ile de la Réunion où elle a posé ses valises après de nombreux voyages et déménagements.



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